On n’est jamais prêt à devenir proche aidant du jour au lendemain, pas plus que de devoir se séparer d’un être cher qui en vient à requérir davantage de soins.
C’est pourtant ce qu’a vécu Carole Tavernier.
« C’est un choc effrayant »
Mme Tavernier est mère d’une fille lourdement handicapée qui a été victime d’un accident vasculaire cérébral (AVC)à l’âge de trois mois, mais dont on a découvert l’existence quand elle a atteint 18 mois.
« Elle a 36 ans aujourd’hui et a besoin de soins constants. Elle vit en hébergement parce qu’elle demande trop de soins (pour s’en occuper seule). Il y a six ans, j’ai dû me résoudre à la placer. C’est un choc effrayant… » raconte-elle.
Quelque 150 crises
Autre choc s’il en est un, c’est le fait de devoir quitter son emploi pour s’occuper d’un être cher. Ce qui est le cas de Carole Tavernier qui, à l’emploi d’Hydro-Québec à l’époque, a dû prendre sa retraite à 47 ans pour assurer la relève d’une personne qui s’occupait jusque-là de sa fille, mais devait quitter pour prendre soin de son conjoint atteint cancer.
« Du jour au lendemain, je suis devenue proche aidante à plein temps, sans préparation. (Avec le temps) la maladie a progressé et ma fille requérait de plus en plus de soins.On parle (à l’époque) de 150 crises d’épilepsie par année.Quand je l’ai placée, ça faisait 27 ans que je dormais quatre heures par nuit, pas plus. Entre les crises et la médication, c’était vraiment spécial ».
On doit redonner…
Et, il n’y pas de manuel dans lequel on apprend à s’adapter.
« (Ça vient) par la force des choses » confie Mme Tavernier. « Quand tu es face à un mur, tu t’écrases devant ou tu trouves une façon de le contourner (…)Le choc, ça a été quand j’ai été obligée de la (sa fille) placer. Ça a été la pire chose pour moi.C’est pire que le handicap encore. Confier mon enfant, la personne la plus vulnérable avec plein de besoins à des gens qu’elle n’avait jamais vu, ça demande une bonne dose de confiance.Au fil du temps, quand j’ai vu qu’elle était heureuse, ça m’a amenée à m’impliquer socialement ».
C’est pourquoi Carole Tavernier, depuis quelques années, fait profiter les autres de son expérience.
« Je pouvais aider d’autres personnes en leur disant : la voie est par là, vous pouvez la suivre. Ça nous force à devenir bienveillant ces expériences-là. De fil en aiguille, j’ai aidé un de mes amis et je suis devenue présidente d’un CHSLD (…) La vie ça tourne tout le temps. Ma grand-mère me disait toujours : « quand on a beaucoup reçu, on doit beaucoup redonner. Fais-en profiter les autres ». C’est pour ça que je m’implique beaucoup » souligne celle qui, entre autres, a participé à l’élaboration du concept des maisons des aînés de la ministre Marguerite Blais.