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Elle « s’envoie dans les  airs »  576 fois

Elle « s’envoie dans les airs » 576 fois

Publié le 13/10/2022

Au grand dam des amateurs de parachutisme, il ne sera plus possible de s’élancer dans le vide du haut du ciel de Saint-Jérôme en parachute, Parachutisme Adrénaline quitte Saint-Jérôme pour aller s’établir à Saint-Esprit dans la région de Lanaudière.

Une décision qui laisse sans mot les amateurs de parachutisme nombreux dans la région. Laissons Rosemarie Lauzon nous raconter à sa manière, bien à elle, qu’est-ce que le parachutisme?

Recevoir le ciel en cadeau

Pour qu’est-c’est faire que je n’ai pas encore écris un roman là-dessus? Ça mérite un roman, un film, un discours, au moins. Adrénaline m’a fait tomber en amour avec le parachutisme, avec le lieu, avec eux. Savez-vous c’est quoi, vivre ? (Oh ! Que de prétention. Pardon.) En tant que parachutistes, on a goûté au ciel, au 7e ciel, et on a vécu quelque chose digne du 7e art. 
Comme les fois où j’ai eu la chance de flotter, 
accrochée sous ma voile, 
dans la lumière dorée, 
dans un décor à faire hérisser les poils. 
Mes pas se trimbalaient sur le plancher de nuages,
Mes yeux scintillaient vers le champ d’atterrissage,
Et mon cœur venait de trouver son ancrage. 
C’était le paradis, Batinses, dans le vrai sens du mot !
Le paradis, tu le ressens, aussi. Quand tu quittes l’avion pour plonger dans le firmament, c’est pas la sensation d’un manège qui te monte et te dérange le cœur, c’est plus doux : tu te sens flotter sur un tapis de vent. C’est comme si on ne tombait même pas dans le vide. Il faut attendre plusieurs secondes avant de commencer à se rendre compte qu’on a descendu.
En bas, on touche le sol, mais on ressent le ciel.
Ça, on peut le voir et le vivre au centre de parachutisme Adrénaline, de Saint-Jérôme. 
Allez-y… il vous reste 30 secondes et demis. Oh !
Ben oui, ça faaarme. Le terrain a été vendu.


LE PARACHUTISME

Depuis l’enfance, j’ai toujours su que j’allais essayer cette expérience-là au moins une fois dans ma vie, et que ça allait être tiguidou ! Mais ça, ça voulait dire que j’allais monter jusqu’au zénith, et que rendu en haut, il faudrait que je lâche complètement prise… et que je me pitch en bas… Wôoo. Mais wô minute ! Je n’ai pas peur des hauteurs, et je les adore, même. Mais j’avais peur du vide. De l’espace entre le « en haut » et le « en bas ». Mais bon, le temps nous a fait grandir, moi et mon idée de sauter, et à l’âge de 17 ans, j’ai eu la joie de faire un tour d’avion pour essayer de me convaincre. Ça m’a convaincu et j’ai voulu sauter. Je l’aurais fait si j’avais apporté mon argent. Je l’avais laissé chez nous pour ne pas dépenser. Ah ! La belle idée. Pendant les 6 années qui ont suivi, à chaque été, je me tortillais intérieurement pour aller visiter l’azur. Mais j’avais perdu mon élan courageux. 
À 23 ans, par un bel après-midi orageux, avec l’esprit de contradiction et le sens de l’aventure, je l’avais retrouvé, mon élan. Mais ça a l’air que ce n’est pas trop possible de sauter dans un ciel électrique. Donc j’ai réattendu. 9 jours plus tard, mon courage m’a écarquillé les paupières et m’a garocher en dehors de mon lit. 
C’était aujourd’hui. 
C’était en 2014, le 24 juillet. 
C’était un jeudi. 
C’était le moment où je m’envolerais. 
J’ai toujours eu la tête dans les nuages, là, mon corps allait enfin la rejoindre.

J’arrivais… en même temps qu’un ciel gris. « NON, j’laisserai pas le ciel ennuager mes rêves. »  Mais comment j’aurais pu ? Je ne pouvais pas être « ennuagée » par ce qui m’attendait. Les voiles qui ouvraient faisaient crier les passagers tandems qu’on entendaient s’épanouir à 5000 pieds de hauteur. (Oui, on parle en pieds, au Canada, dans le monde du parachutisme.) Et bientôt, j’admirais les voiles qui atterrissaient en donnant l’impression qu’il pleuvait des couleurs.

Aussitôt, on m’a annoncé que c’était à mon tour d’enfiler un harnais qui allait être clippé au parachute de l’instructeur.  « Vous allez ne faire qu’un. », qu’on m’a dit. « Ben oui, ok. Mmm. M’en fou. » Je pensais qu’il y aurait du lousse entre moi et l’instructeur. Un espace vide. Oh ! Pas-Du-Tout. L’espace vide, il est quand on quitte l’avion, dans le ciel, partout autour de nous. Mais sinon, on est succionnés l’un contre l’autre, Batêche ! 

Mais bon, ça ce n’était pas tout de suite. Il fallait embarquer dans l’avion avant. On parlait, il me niaisait, je le croyais. Tout allait bien. Notre « ascenseur » décollait et j’avais l’impression que ça montait comme dans un téléphérique, retenu par un câble. J’étais prête et sereine. Et naïve, si vous saviez à quel point j’ai cru aux niaiseries de l’autre en arrière. En y repensant, ça me fait tellement rire. En passant, je vous souhaite d’avoir peur pour votre saut. Plus on a peur, plus on s’amuse. Et j’en ai l’expérience. Et si vous avez vraiment trop peur, les instructeurs sont là pour détendre l’atmosphère en vous faisant rire, et peuvent répondre à toutes vos questions sur la sécurité. Après, le soir même, vous dormez dans votre lit, pas dans votre cercueil. Je comprends totalement le chior émotif qui peut vous accompagner jusqu’en haut, le maudit. Mais je vous jure, que dès que c’est à notre tour (enfin) de fuguer de l’avion : on n’a plus faim, ni soif, ni froid, ni chaud, ni de fatigue, ni de stress… et on vit comme on n’a jamais vécu. C’est juste du pur bonheur. Bon, ça, sur le coup, je ne le savais pas. Je suis sortie de l’avion, avec le corps crispé et en retenant mon souffle. Je me suis bien aperçu, au bout d’une seconde et demi, que je n’avais pas peur pour de vrai. Et j’ai profité des 50 secondes d’intensité. Et des 4 minutes sous voile avec le paysage qui me faisait des coucous. 
J’ai touché le sol, j’ai ressenti le ciel, et je savais que je n’arrêterais pas.

J’ai fait 576 sauts. 
J’étais en extase encore au 300e. Et oui, moi aussi je hurlais sous voile, et Câline qu’on m’entendait. Surtout que j’ouvrais plus bas que les tandems.

Les disciplines, entre autres :
De la VR (du vol relatif) : faire des figures en restant sur la bedaine à plusieurs. 
Du freefly : faire toutes sortes de cabrioles, mais assis, debout, la tête en bas…
XRW : s’accrocher plusieurs voiles ensemble
Swoop : atterrissage à grande vitesse
Wingsuit : vol dans une combinaison ailés
Moi, ma partie préférée, ça reste les ouvertures ! Parce que ça brasse. (Et ça rassure)
 
Un de mes premiers sauts. J’étais tellement stressée que j’ai voulu annuler. Comme j’ouvre la bouche pour l’annoncer à mon entraîneur, il me dit que c’est l’temps d’embarquer dans l’avion. Shit! Je venais de perdre mes capacités à renoncer. Je l’ai suivi. J’ai monté stressée, mais j’ai sauté apaisée. Le saut n’était pas parfait, (Hé ! Que non…) mais j’ai pu me corriger très facilement. En sortant de l’avion : j’ai fait la tortue ! Je me suis retrouvée sur le dos, mais on m’avait montré à arquer. C’est ce que j’ai fait et je me suis rapidement remis dans la bonne position. 

À la même époque, j’ai commencé à accumuler des photos et des vidéos que j’ai déposé dans un dossier nommé très ironiquement : « Activité banalement quotidienne ». Ben Vinyenne, ça l’est devenu ! J’ai même eu mon parachute avant mon auto. (Bon, je n’ai toujours pas d’auto, mais au moins, depuis le temps, j’ai mon permis de conduire.) Il y a eu un temps où je sautais 4, 5, 6 fois par jour. Je finissais la journée avec la sensation d’être sur un quai chambranlant sur le bord de l’eau. L’adrénaline et l’endorphine faisaient effet. Et même, dès le premier saut. Si une journée je me sentais en dehors de mes souliers, j’allais sauter et ça me rendais de bonne humeur.

Est-ce qu’on saute l’hiver ? C’est rare mais ça peut arriver.
Est-ce qu’on peut sauter d’un hélicoptère ou d’une montgolfière comme dans les films d’action? Mais certainement. Ça aussi c’est plus rare, mais ça arrive. Je me trouve chanceuse. Moi, c’que j’ai fait, c’est de sauter d’un hélico, l’hiver. Il y a deux choses qui m’ont fascinées.
Primo, c’est fou à quel point le vent faisait une différence de température. Quand je me sortais un bras par le trou de la porte, il devenait glacial, et quand je le rentrais, il redevenait tiède. 
Secondo, quand on saute d’une montgolfière ou d’un hélico, ils sont statiques. Donc il n’y a pas de vent relatif. Donc, là, on a la sensation de tomber. Et j’AAAAADOOORE ça ! Mais juste quelques secondes, le temps de pogner notre vitesse terminale. 
(Pour les sauts de montgolfière, en général, c’est interdit, mais il y a des cas où on a une permission spéciale.) 

Surprenants…
L’eau, à partir d’une certaine distance, on ne la voit plus bouger. À l’horizontale, quand on observe la pluie, on voit un voile gris, mais pas le détail des goutes qui tombent. Et à la verticale, quand l’avion nous monte, et qu’on regarde les cours d’eau, à partir d’une certaine hauteur, l’eau se fige comme sur une photo. 
Et pour le vent, on est habitué en km/h. 
On demande à la manifeste la vitesse des vents, elle nous répond en mile à l’heure. 
On demande au pilote, il nous répond en nœuds à l’heure. 
Et il faut se débrouiller avec ça ! Mais on s’habitue assez vite.


LES PAYSAGES DE SAINT-JÉRÔME.

Lorsque le jour s’endort, on peut voir LE soleil d’Hakuna Matata, Il est installé par le Roi Lion lui-même et il mélange son éclairage dans les nuages, ce qui fait rugir de bonheur les chanceux qui sautent dans ses rayons. Quoi que, cette image n’est pas propriété d’un centre de saut en particulier. Ce que le firmament de Saint-Jérôme offre particulièrement à ceux qui se suspendent à leur voile, est un joyeux contraste de nature et d’urbanité :
Très loin sur le plancher du sud, coule, de l’est à l’ouest, le fleuve Saint-Laurent, qui s’étire tellement loin vers l’horizon, qu’on pourrait croire qu’il monte dans le ciel. Il faudrait demander aux parachutistes de Gatineau si, parfois, ils voient un fleuve au-dessus de leurs têtes. Au milieu du fleuve : le stade olympique et le reste d’une grande ville touristique qui s’étend sur son île. Et de chaque bord des rives, de larges espaces verts, qui nous observent de très loin.
L’ouest est imbibé de lacs, qui sont quasiment plus nombreux que les arbres, et les arbres envahissent le territoire jusqu’à trop loin. 
Le nord-ouest ose repousser la forêt pour y faire pousser Les Grands Champs. Attrayants pour y atterrir, mais on ne peut pas y poser les pattes ni étendre notre voile en ce sol, sauf si la Détresse elle-même nous l’ordonne.  
Le nord fait émerger ses montagnes et ses vallées, comme le printemps fait émerger ses pissenlits, et le soir, un soupçon de lumières allumées, trahie les emplacements de quelques villages cachés. 
La banlieue qui recouvre l’est endommage la nature de ses teintes grisâtres lorsque règne le soleil, mais nous colore la vue et la vie quand le crépuscule lui fait scintiller les lumières dans ses rues.

EUX.

Un ordre, une peuplade, une trâllée de passionnés. 
J’aurais voulu les présenter. Ils valent le détour. 
Ils me font rire en parodiant mon excessive expressivité. Mes mimiques, mes sons.
Ils peuvent se déguiser en vaches, sauter avec des accessoires de piscine, sauter en wetsuit. 
Ou se donner le défi de s’arracher les poils avec des bandes de cire en chute libre.
La montée peut être drôle, aussi. Avec la gang de singe, c’est pas rare que je pars à rire. 
Un exemple parmi mille autres : (quand on rentre dans l’avion, on s’attache. À 1500 pieds, on se détache.) Une bonne fois, y’en a un, Charles de son nom, qui dit à un passager tandem : « Là on se détache parce que la police peut pu nous voir. »  
Quand j’ai commencé, j’étais une des seules filles parmi les gars. J’ai adoré leurs niaiseries, leurs folies, leur énergie. Aujourd’hui, il y a de plus en plus de filles qui ose sauter dans l’aventure, et je les encourage énormément.

Maintenant, comme quand je suis venu me donner du courage à 17 ans, je m’amuse à être à faire des tours d’avion. Ils appellent ça : être « co-pilote » (Ou co-pit). Ohh ! Le grand mot. Je ne touche à aucun instrument. Je dépose mon postérieur sur le banc confortable et mes yeux sur les paysages qui m’émerveillent encore. J’en ai mangé du ciel. Céline Dion a dit : « Sky’s the limit. » Moi je pense plutôt : sky’s the minimum, surtout pour les activités aériennes.

Bon, rendez-vous jusqu’au 16 octobre 2022
881 Lamontagne (secteur Bellefeuille)
sur « la montagne », au-dessus des BELLES feuilles
450-438-0855

Et l’année prochaine :
Parachutisme Adrénaline déménage chez Parachutisme Montréal Rive-Nord, à Saint-Esprit. Vous viendrez écornifler.

Et comme on dit dans l’monde du parachutisme : Blue sky.
Arc-en-ciella