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Rendez-vous avec l’inclassable Diane Dufresne

Photo Reine Côté –

Diane Dufresne au Salon des aînés : Crier pour ceux qui ne le peuvent pas

Rendez-vous avec l’inclassable Diane Dufresne

Publié le 11/09/2025

Saint-Jérôme a reçu de la grande visite au Salon des aînés, qui se tenait samedi, alors que la grande Diane Dufresne avait accepté d’accorder un long entretien à Michèle Sirois devant public.

Un événement rare, un moment privilégié ayant suscité un immense intérêt de la part des visiteurs, qui ont manifesté vivement leur enthousiasme de voir et entendre enfin cette artiste iconique du Québec, désormais octogénaire.

Elle n’était pas la seule figure connue à se pointer à cette journée spéciale, qui serait le plus important salon des aînés du Québec, dit-on. On a également reconnu Sonia Benezra, Sylvie Payette, Nathalie Simard, Geneviève Brouillette, Jocelyne Cazin, la ministre Sonia Bélanger et la première du Québec, Isabelle Brais.

Dès 9 h du matin, les visiteurs se pressaient pour faire le tour des nombreux kiosques délivrant une foule d’informations, aussi utiles qu’indispensables, qui ont rapidement rempli le grand sac leur ayant été offert par les bénévoles en franchissant la porte du salon.

Tout près de l’entrée, l’ancienne animatrice de TVA, Jocelyne Cazin, tenait elle aussi un kiosque afin de présenter ses quatre bouquins, dont le tout dernier : Funestres récoltes.

Invitée de marque

En avant-midi, les visiteurs se sont pressés nombreux pour entendre la conférence de Sonia Benezra. Mais le clou de la journée était évidemment La Grande entrevue de 13 h 30, celle de Diane Dufresne, que la ministre des Aînés, Sonia Bélanger, suivie de Nathalie Simard, se sont empressées d’introduire, visiblement impressionnées elles aussi, par la présence de cette artiste inclassable de la scène musicale du Québec.

Présentée comme invitée vedette à cet événement annuel destiné aux aînés du Québec, Diane Dufresne a vite corrigé le tir pour replacer le terme « vieux » avec une fierté non feinte.

L’animatrice Michèle Sirois s’est ensuite lancée dans la genèse de l’artiste, qui est née et a grandi à Montréal. Et oui, elle a aussi fréquenté le Parc Belmont, destination familiale attractive qui a connu son âge d’or bien avant La Ronde.

Bien qu’elle ait chanté ses premiers airs dès l’âge de sept ans dans les cabanes à sucre. « Mon gros hit, c’était “Voulez-vous danser grand-mère” », lance-t-elle. 

Fille d’une maman excentrique et d’un père remarié à une femme austère, qui ne souhaitait rien de moins que de la voir mariée et assidue aux tâches de la maisonnée, la jeune Diane s’est lancée dans des études du soir, tout en travaillant dans un hôpital, le jour.

À cette époque, la jeune Diane ne songeait guère à une carrière musicale, n’eut été de l’intervention de son amie Ginette Nantel, qui a décelé son potentiel artistique et lui a ouvert les portes en la mettant en contact avec quelques artistes bien placés. Il y a eu le musicien François Cousineau, qui a été l’amoureux de la Diva, le grand pianiste et compositeur André Gagnon. Mais une rencontre provoquera un tournant dans sa jeune carrière, celle avec l’auteur Luc Plamondon. « J’ai beaucoup été amoureuse de Plamondon. Il a quand même changé ma vie », confie-t-elle.

Premières rencontres

Beaucoup l’ignorent, mais c’est à Saint-Jérôme que Diane a donné son premier spectacle. « La première fois que j’ai chanté en public, c’était à Saint-Jérôme et accompagnée d’André Gagnon », se rappelle la Diva.

Elle partira en 1965 pour la France, avec Ginette Nantel, cette dernière étant convaincue d’une possible carrière pour sa jeune amie, qui n’avait encore que 20 ans, mais un timbre de voix distinct et une personnalité singulière.

Et c’est ainsi que Diane est devenue Diane Dufresne et n’aura de cesse de se faire remarquer par son authenticité et son audace provocatrice, qui fera d’elle une artiste inclassable au fil des ans. On découvrira en elle une rebelle, une rockeuse qui s’assume.

Pas pour rien qu’elle s’est fait remarquer dès ses débuts dans le milieu de la chanson. Et pas des moindres. Un jour pas si lointain d’ailleurs, un certain Aznavour lui a dit que parmi toutes les interprètes féminines talentueuses, il n’y avait qu’une seule Diane Dufresne, qu’elle était unique.

Photo Reine Côté
Dans un long entretien avec Michèle Sirois, l’artiste Diane Dufresne s’est ouverte sur sa vie et les débuts de sa carrière.

L’unique Diane Dufresne

Aznavour s’était produit souvent au Québec, au début de sa carrière et avait remarqué Diane Dufresne. Voici ce qu’il en disait : « Quand on parlera de Diane plus tard, on dira « elle, elle est différente… ». Plus tard, celui-ci s’exprimait ainsi. « J’aime beaucoup Céline, que je trouve formidable et très bonne, mais je n’ai jamais été surpris par Céline. J’ai été touché par son travail, son professionnalisme, par sa liberté, sa voix, sa manière de chanter. Ça, ça fait de grandes chanteuses, mais la surprise, la personne qui vous en fout plein la gueule avec autre chose qu’uniquement chanter, il n’y en a qu’une dans le monde, il n’y en a pas deux, et c’est Diane Dufresne. »

Il y aura beaucoup de rencontres mémorables sur la route de l’artiste, des expériences uniques comme celle de Starmania. Qui n’a jamais entendu parler de Magie Rose, ce spectacle à grand déploiement tenu dans l’enceinte du stade olympique rempli par une assistance vêtue ou pourvue d’un élément rose, tout comme l’artiste sur scène ?

Qui n’a jamais entendu l’interprétation inqualifiable de « Tiens-toé ben j’arrive » sans parler de tous ses tubes à succès ? Avec le temps, son style de chansons a évolué, l’interprète s’est quelque peu assagi. Rappelons-nous « Hymne à la beauté du monde », où le timbre vocal de l’artiste ressort à son meilleur.

Réservée et pleine d’audace

Malgré la notoriété, Diane Dufresne avoue que le succès n’a jamais atteint sa profonde envie de rester privée. Elle se dit peu sociable, ce qui ne l’empêche pas de créer et de chercher comment étonner encore et encore son public. 

C’est que, malgré sa nature réservée, l’artiste en elle a continuellement cherché à toucher son public. D’où l’audace et la provocation…et les costumes de scène spectaculaires et même les seins nus, ce qu’elle définit comme un instrument d’art de scène. « C’est pour ça que j’ai porté des costumes tellement lourds et tellement osés », affirme l’artiste.

Puis il y a eu l’influence de Janis Joplin qu’elle a vu en spectacle. En découvrant le flot d’émotions provoqué par l’artiste américaine en s’exprimant haut et fort, Diane Dufresne s’est par la suite permise de laisser sortir son cri sur plusieurs pièces. « Je criais pour bien des gens qui ne pouvaient pas crier », assure-t-elle.

« Peut-être que j’étais féministe sans le savoir. Quand on est une femme, on ne pouvait pas faire beaucoup de révoltes », rappelle la Diva québécoise, qui a interprété bon nombre de textes signés Plamondon autour de tabous. Peut-être, oui par envie de justice, confirme-t-elle à l’animatrice.

Tout continue

Puis un jour, elle a rencontré celui qu’elle nomme l’homme de sa vie. Elle avait 50 ans. Et l’amour dure encore après 30 ans de vie commune.

Une vie amoureuse qui dure et une carrière qui dure depuis quelque 60 ans malgré le caractère sans compromis bien connu de l’artiste. Mais intègre. Et ceci explique peut-être cela. « Si tu veux plaire à tout le monde, tu ne peux pas y arriver », qui reconnaît qu’elle s’investissait avec tant d’intensité sur scène, qu’il lui a fallu un jour cesser d’interpréter Le Parc Belmont, au propos relatant la folie.

Mais l’artiste demeure créative. Elle s’intéresse à beaucoup de choses, dont l’écologie. Elle a fait connaître son talent de peintre, mais elle signe également des textes. La créativité demeure primordiale dans sa vie. Pour elle, c’est une façon de garder l’enfant en soi bien vivant, dans son instinct, loin du système sociétal qui nous en éloigne.

Diane Dufresne continue de créer, car elle y perçoit une « espèce de liberté de vivre autrement et c’est ce qui nous fait du bien ».

À l’aube de son 81e anniversaire, l’artiste considère chacun de ses réveils matinaux « comme un miracle ». « La qualité aussi d’être vieux, c’est de savoir toutes ces beautés qu’on a à l’intérieur et de pouvoir les partager. »