« Je n’avais pas vraiment besoin de savoir lire ou écrire dans mon travail de chauffeur de lift dans une usine de bois. J’étais en poste depuis 30 ans et je réussissais à me débrouiller pour gagner ma vie ».
André parle au passé. Il a perdu son emploi. À ce moment-là, ce qui devait être une simple transition vers un autre emploi, en raison de son expérience, a été très ardu, car il est analphabète.
« Je n’ai pas abandonné l’école. L’école m’a abandonné », lance-t-il. Une phrase assassine qui fait réfléchir.
Après son primaire, André fait son entrée au secondaire et ce, même si aujourd’hui, il n’est pas en mesure d’écrire la phrase simple: Le soleil est jaune.
« Les professeurs étaient tannés de me voir doubler et rester dans les mêmes classes qu’on me faisait monter même si je ne savais pas lire ni écrire. Je sais compter par contre », ajoute-t-il en ricanant.
Moins drôle, André se retrouve dans les classes des « marteaux » au secondaire. « L’importance dans ces classes de pas bons étaient d’être bon de ses mains. J’ai beaucoup appris à travailler le bois ».
Honte de lui et gêné de ne pas être « comme les autres » élèves du secondaire, André quitte l’école. Il travaillera, s’achètera une maison et vivra avec sa femme.
« C’est ma femme, plus vieille que moi, qui paye les comptes et s’occupe de tous les papiers. Moi, un ordinateur, je ne sais pas comment l’ouvrir. Un téléphone cellulaire, je ne sais pas le faire fonctionner », admet-t-il candidement.
Il ajoute sur ton humoristique, l’humour étant un qualificatif qui décrit bien ce bon vivant : « Quand je vais au guichet automatique je le supplie de me donner de l’argent sans me poser de question ».
Conscient que l’aide de sa femme ne peut durer éternellement, André veut être autonome et indépendant.
À l’été 2022, il frappe à la porte d’une école pour adulte. Déterminé, il y consacrera son été. Mais en vain, il sera renvoyé « pour manque de progrès ». Il était découragé, mais il ne s’est pas laissé abattre.
Il se rend à la Maison des mots, un groupe d’alphabétisation à Sainte-Thérèse. Il sera accueilli à bras ouverts. Non seulement, il poursuit son apprentissage avec d’autres personnes analphabètes provenant de différents milieux et de différentes nationalités, mais il a bénéficié d’une subvention pour se dénicher un emploi et étudier.
« Je suis à l’école un soir par semaine à raison de trois heures. Je sais que ce sera long, mais je vais y arriver à lire et écrire », livre cet homme fort sympa.
Des efforts, André n’a pas peur de ça. Il met les bouchées doubles. Chaque soir, il fait preuve de créativité en lisant des livres pour enfants avec des images pour l’aider à comprendre et à deviner les mots.
Bien qu’il ne soit pas en mesure de lire les plans ou les instructions, André est un expert avec un « vrai » marteau, capable de créer des chefs-d’œuvre de ses propres mains.
La persévérance d’André devrait servir d’inspiration à tous ceux qui sont confrontés à des difficultés similaires. Sa capacité à trouver des solutions innovantes et à se concentrer sur ses forces est un rappel important que même face aux obstacles, il est possible de trouver le succès et le bonheur.