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Sortir les pieds devant

Sortir les pieds devant

Publié le 08/04/2020

MATHIEU LOCAS
Je suis monté sur un ring de boxe une fois dans ma vie. C’était à l’été 1996. Dans le cadre d’une série de reportages, publiée dans le Journal Le Mirabel, j’avais décidé de m’entraîner avec huit athlètes amateurs de notre région. Mises à part mes quelques longueurs de piscine avec les nageurs de Neptune, tous les athlètes performaient, au moins, sur la scène nationale. En boxe, je n’avais pas pris le pire, je m’étais frotté au champion canadien des poids lourds Jean-François Bergeron. Ce dernier revenait à peine des Jeux olympiques d’Atlanta et sur le point de mettre un terme à sa carrière amateur dans le but de faire le saut chez les professionnels.
Après trois rounds de deux minutes et un œil au beurre noir, j’ai pris ma retraite. Chaque fois que je me remémore ce bon souvenir, la première chose qui me vient en tête est le son de la cloche au 1er round.
En l’entendant raisonner, je me suis immédiatement dit: «Je vais me faire faire mal parce que je suis poigné entre quatre câbles, puis je ne peux pas me sauver.» Un sentiment de peur m’habitait. Quand tu te frappes sur le doigt avec un marteau ou que tu passes par-dessus tes poignées à vélo, tu ne sais pas que ça va arriver. Moi, je savais que des coups de poing sur la gueule m’attendaient.
Pour la petite histoire, le grand Jean-François a été, comme il l’a toujours été, d’une gentillesse exemplaire. L’œil au beurre noir, c’est ma faute, je lui avais foncé dessus avec ma technique plutôt douteuse.
Ce que le personnel médical vit présentement, c’est le même sentiment de peur que j’ai eu en entendant le son de la cloche annonçant le début du combat. Avant même d’entrer dans leur bâtiment de travail respectif (hôpital ou CHSLD), plusieurs membres du personnel se disent: «Parce que je rentre ici, debout sur mes deux pattes aujourd’hui, je vais peut-être en sortir les deux pieds par en avant dans quelques semaines.»
En guise de solidarité avec, notamment, les infirmières, je vous invite à vous rendre sur le site Web de leur syndicat au [http://www.fiqsante.qc.ca/jedenonce].
Si vous allez dans la section Laurentides, vous allez lire des histoires d’hommes et de femmes présents en zone de guerre. Des femmes enceintes, jusqu’à 30 semaines, qui se voient refuser un retrait préventif. Une autre, de retour de voyage le 20 mars dernier, se fait appeler par sa supérieure l’ordonnant de rentrer au travail après seulement huit jours en quarantaine. Elle a refusé et sa chère patronne refuse de la payer, car elle ne respecte pas ses ordres.
Je pourrais prendre la moitié du journal pour vous raconter des histoires déchirantes et troublantes.
Je lance donc une invitation à tout le personnel qui travaille dans un hôpital, CLSC ou CHSLD. Vous êtes médecin, infirmière et infirmier, préposé(e), concierge, électricien, plombier, je souhaite vous lire. J’accepte les dénonciations, mais j’accepte aussi les belles histoires. Vous voulez demeurer anonyme… pas de problème! En cette période difficile, la mise au jour de certaines situations sera ma contribution pour tenter de dissuader les épais et les épaisses qui courent les épiceries, seulement pour s’acheter un paquet de réglisses alors qu’ils toussent à s’en cracher une rotule. Mon courriel est en bas de la page.
Mise au point
Petit ajustement concernant mon papier de la semaine dernière intitulé Le dernier club sandwich. C’est vrai que ma fille a mangé le dernier club avant la fermeture du resto Chez Johnny. Ce qui l’est moins, c’est que Yves Roch est actionnaire. Mes excuses à Maurice Gibeault. La personne impliquée dans l’histoire m’avait mal informé. Après cette tempête COVID-19, je vais m’arranger pour être l’un des premiers à commander un club et terminer ma visite avec un bon morceau de gâteau au chocolat avec sucre à la crème.
Je demeure disponible à mathieu.locas@hotmail.com.