Le 4 novembre dernier, le ministre des Finances du Canada, François-Philippe Champagne, déposait le premier budget du nouveau gouvernement fédéral de Mark Carney. Alors que plusieurs l’attendaient au printemps dernier, ce sera maintenant la norme d’avoir le budget en automne et une mise à jour économique avant l’été.
Le document de 559 pages contient cinq chapitres : Bâtir une économie canadienne plus forte; Passer de la dépendance à la résilience; Donner plus de pouvoir aux Canadiens; Préserver la souveraineté et la sécurité du Canada et Rendre le gouvernement plus efficace et efficient. Pour y voir plus clair, la rédaction s’est entretenue avec M. Jean-Philippe Brosseau, associé, Conseil en performance financière chez Raymond Chabot Grant Thornton.
Un déficit record
Le chiffre qui retient l’attention est la dette prévue de presque 80 milliards de dollars. « Seules les années pandémiques auront vu un budget plus élevé. C’est beaucoup plus déficitaire que la mise à jour économique déposée avant les élections », déclare M. Brosseau
C’est le premier budget à séparer les dépenses d’investissement (à long terme) et les dépenses de fonctionnement (quotidiennes), ce qui complique les comparaisons avec les années précédentes. Alors que le gouvernement vise à atteindre l’équilibre budgétaire au niveau de son fonctionnement, les dépenses qu’il qualifie d’investissements sont classées ainsi puisque le gouvernement s’attend à des retombées dans ces programmes et aides financières à plus long terme. Cette stratégie lui semble nécessaire pour sortir de sa dépendance à son voisin du sud et pour créer les conditions favorables à cet engagement.
« D’un côté, il y a d’importantes dépenses qui sont prévues pour soutenir les secteurs de l’activité économique qui sont touchés par les différents droits de douane avec les États-Unis. L’autre élément où il y a d’importantes dépenses, c’est la défense, surtout avec l’objectif avoué d’atteindre la cible prévue par les pays membres de l’OTAN ». (2% du PIB, actuellement sous 1% au Canada)
D’un autre côté, il y a ce que le gouvernement appelle des dépenses de fonctionnement qu’il souhaite plafonner et même réduire de beaucoup dans les prochaines années avec des suppressions de postes dans la fonction publique (près de 40 000 postes) ou dans la fin de certains programmes.
Des réactions du Bloc
Le député de Rivière-du-Nord, Rhéal Éloi Fortin, dénonce « un budget marqué par une manœuvre comptable […] qui ne répond à aucune des six demandes incontournables du Bloc qui font consensus parmi les Québécois ».
Ces demandes concernaient l’indexation des transferts en santé, la reconduction de l’Initiative de création rapide de logement, les transferts en infrastructure, l’harmonisation de la prestation de la sécurité de la vieillesse pour tous les ainés de 65 ans et plus, la mise sur pied d’un programme pour aider les premiers acheteurs à financer leur mise de fonds et le remboursement des 814 millions qui reviendrait au Québec ayant été payé aux autres provinces de façon anticipée pour la taxe carbone.
Il s’indigne également de l’absence de mesure de lutte aux changements climatiques et de la place occupée par les investissements dans les énergies fossiles : « Les pétrolières pourront continuer d’engranger encore plus d’aide publique pour la captation de carbone et d’autres crédits d’impôt jusqu’en 2040. Tout cela après avoir coupé dans la tarification du carbone, coupé le soutien à l’achat et les quotas de véhicules zéro émission, coupé dans la stratégie pour planter des milliards d’arbres et plus encore. Mark Carney avait promis de la compétitivité climatique; il s’agit plutôt d’une capitulation climatique ».
Même s’il salue certaines mesures comme dans le transport de marchandises, l’abandon de la taxe de luxe sur l’achat d’aéronefs ou l’investissement dans les infrastructures navales au Québec, le député bloquiste décrit ce budget « aux priorités conservatrices, mais au déficit bien libéral ».

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