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X suce Y

X suce Y

Publié le 14/01/2020

MATHIEU LOCAS
Le titre vous choque? Attendez de lire l’histoire. Une histoire qui implique deux enseignants et trois élèves d’une école secondaire de Saint-Jérôme. Afin de préserver l’identité des profs, identifions-les comme Monsieur X et Monsieur Y. Fin novembre-début décembre, un des élèves âgé de 18 ans, se présente au Carrefour du Nord. Muni de la photo de Monsieur Y, récupérée sur les médias sociaux, il se rend à un kiosque où l’on peut faire imprimer des images sur des chandails.
Le jeune homme fait imprimer la photo, en gros, sur le devant d’un t-shirt. Le texte se résume à: X suce.
Sans doute heureux de son nouveau style vestimentaire, notre «designer en herbe» a choisi de déambuler dans le centre commercial. Une ancienne élève de Monsieur Y l’a aperçu. Technologie aidante, elle a capté l’image pour ensuite l’envoyer à son ancien enseignant.
Entre temps, les élèves sont retournés en classe. Pendant qu’il présentait de la matière, Monsieur X s’aperçoit que ça rigolait d’une façon inhabituelle autour de l’élève de 18 ans. Sous son chandail, de la gamme de vêtements obligatoires à porter dans cette école, notre intellectuel avait enfilé son t-shirt: X suce, avec la photo de Monsieur Y. Il faisait rigoler ses collègues à monter et descendre son chandail pendant que l’enseignant avait le dos tourné. Monsieur X a fini par voir le fameux chandail et l’élève s’est fait montrer la porte.
Deux autres élèves, d’âge mineur, portaient le même chandail. La direction a suspendu tout ce beau monde pour trois jours.
La nouvelle a vite fait le tour, ci bien que le 9 décembre, le président du syndicat Christian Aubin a dû débarquer à l’école. Une quarantaine d’enseignants ont pris part à la rencontre. Insultés par le manque de respect, de support et d’empathie de la direction de l’école et de la commission scolaire, certains profs étaient prêts à débrayer. Ils y ont vite renoncé, car cette réaction impromptue aurait coûté des dizaines de milliers de dollars de pénalité au syndicat.
Les enseignants semblent prêts à pardonner aux plus jeunes, mais le scénario est différent pour l’élève majeur. Sans exposer son cheminement scolaire, le président du syndicat confirme qu’on a affaire à un «bon client». Et comme il est majeur, les enseignants auraient aimé qu’il termine sa formation secondaire au service aux adultes.
«Mme Desroches (DG de la CSRDN) est très préoccupée par le taux de diplomation. C’est bon pour les données d’une commission scolaire qu’un élève, qui a déjà doublé, obtienne son diplôme d’études secondaires en demeurant dans le cheminement normal. Les enseignants le savent et c’est pour cette raison qu’ils sont choqués, car l’élève va finir l’année à l’école», affirme Christian Aubin. (déclaration faite le 6 janvier)
À la Commission scolaire, on ne veut pas commenter. On se cache derrière la Loi sur l’accès aux documents des organismes publics et sur la protection des renseignements personnels. Même pas une laconique déclaration du genre: «Cette situation est regrettable, nos enseignants sont importants et nous allons les épauler dans cette épreuve».
C’est particulier de constater comment le courage de la commission scolaire, à défier les lois, varie selon la situation. Quand vient le temps de défendre des enseignants face à des élèves qui commettent des gestes, portant atteinte à leur intégrité et leur réputation, la loi sert de bouclier. Mais quand vient le temps de dénoncer le projet de loi sur l’abolition des commissions scolaires, afin de sauver quelques jobs de commissaires, élus par 4 % de la population, on ne se gêne pas pour y aller d’une levée de boucliers.
Je termine par un message aux dirigeants de la commission scolaire, sans doute tentés d’entamer une chasse aux sorcières pour vérifier si les enseignants impliqués m’ont parlé. Ne perdez pas votre temps, la réponse est NON; ma source est ailleurs. Faites plutôt un examen de conscience sur l’encadrement du personnel.
Je demeure disponible à mathieu.locas@hotmail.com.