MATHIEU LOCAS
Benoit Beaulieu quitte Vision Saint-Jérôme. Le membre fondateur du parti a publié un communiqué de presse samedi. Un communiqué de presse qui me fait penser à du fromage P’tit Québec. Prenez n’importe quel bloc de cheddar de 450 grammes, fait à partir de lait pasteurisé, vous allez toujours retrouver une coupe parfaite, un goût aseptisé et une couleur uniforme. Cette chronique va davantage ressembler à un fromage européen au lait cru, tranché à même la grosse meule par un employé de la Fromagerie Yannick de la rue Parent. En retraçant le parcours politique de Benoit Beaulieu, on va mieux comprendre la genèse de son départ.
Il faut d’abord savoir que Benoit Beaulieu n’a pas cherché à se faire élire pour arrondir ses fins de mois. Avant la politique, il a fait les investissements nécessaires pour avoir une indépendance financière. Des convictions personnelles l’ont donc amené en politique. Il y a quelques semaines, je vous disais qu’il y avait un petit goût d’entreprise privée à l’intérieur de l’hôtel de ville. Il est l’un des responsables de cette situation. Au cours du premier mandat, il a «shaké le pommier» à plusieurs reprises. Si certains hauts fonctionnaires étaient habitués à endormir les élus responsables des finances, ils ont frappé un nœud avec Benoit Beaulieu.
Le premier mandat a été difficile pour les fonctionnaires, mais agréable pour les contribuables. Pour la première fois depuis des lunes, la hausse des dépenses a été limitée, avec comme conséquence un gel de taxes pour une très grande majorité de propriétaires.
On ne fait pas d’omelette sans casser des œufs. Cette limitation des taxes ne s’est pas faite d’un pas feutré et avec de la dentelle. L’attitude tranchante de Benoit Beaulieu a été critiquée par certains employés. Parfois, derrière des portes closes, le ton faisait plus que monter. Plusieurs disent qu’on entendait sa voix à travers les murs.
Faut croire que c’est aussi venu aux oreilles du maire. Certains disent que c’est d’un commun accord, d’autres parlent d’une décision du maire, mais toujours est-il que Benoit Beaulieu a quitté le comité exécutif. Depuis son départ, il y a un système d’alternance. Ç’a été une première cassure entre le maire et son conseiller.
Une autre cassure dans leur relation est survenue en mai dernier, au moment du dévoilement public des enregistrements où le maire offre un emploi à Mario Fauteux. Rappelons que Benoit Beaulieu était présent à la rencontre, en octobre 2017, en compagnie de Gilles Robert. Il est passé à l’interrogatoire depuis. Était-ce seulement par les enquêteurs du DGEQ? La Sûreté du Québec, l’UPAC et Jacques Duchesneau ont-ils mis leur grain de sel? Est-ce que Benoit Beaulieu a décidé de se retirer avant de se faire éclabousser par une vague? A-t-il décidé de sauver sa peau en vue de l’élection de 2021? Des questions auxquelles seul lui peut répondre. En réunion privée au printemps dernier, Benoit Beaulieu faisait partie des gens qui suggéraient à Stéphane Maher de se retirer du parti et de siéger comme indépendant le temps des procédures. Maher n’a pas bronché.
L’embauche de Serge Perras à titre de responsable du Bureau de développement économique comme adjoint au directeur a été une autre cassure. Perras est chargé d’attirer des entreprises à Saint-Jérôme. Beaulieu a été le seul à voter contre. Il doutait de ses compétences. Même les conseillères indépendantes Nathalie Lasalle et Johanne Dicaire ont approuvé cette nomination. (J’y reviendrai, une demande d’entrevue a été logée au Service des communications.) Il y a certes eu d’autres cassures qui ont poussé Benoit Beaulieu à prendre du recul.
Maintenant qu’il fait partie des indépendants, Benoit Beaulieu va-t-il se coller à Johanne Dicaire et Nathalie Lasalle? Si c’était le cas, la mâchoire me décrocherait. Même si les trois ont déjà endossé les couleurs de Vision Saint-Jérôme, ils n’ont pas la même vision politique. Pour être encore plus clair, Benoit Beaulieu ne pouvait pas sentir les deux femmes et c’était réciproque.
Je demeure disponible à mathieu.locas@hotmail.com.
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