Invitée par La Porte de l’emploi dans le cadre des festivités de son 40e anniversaire, l’athlète médaillée d’Or s’est longuement confiée sur son parcours parsemé d’embuches dès l’enfance, qu’elle a su contourner grâce à sa grande force de caractère, lui ayant valu au fil des ans 65 médailles internationales dont 25 d’or.
Rien ne prédestinait toutefois Sylvie Fréchette à devenir une athlète internationale, elle qui est née à Rosemont et qui a perdu son père, chauffeur d’autobus, dans un accident de la route, lui laissant pour seule famille, sa maman de 26 ans et son frère, encore bébé.
Une passion est née
Sylvie Fréchette se passionne pour la nage dès son premier cours de natation, une nouvelle activité sportive qu’elle poursuivra intensément au fil des ans. Elle se fait recruter pour faire partie de l’équipe de «nage ornementale» ( l’ancien nom de nage synchronisée) et performe dans un spectacle où elle se fait remarquer par l’entraîneure Julie Sauvé.
« Elle a vu des étincelles dans mes yeux et à 11 ans, j’ai participé à mon premier championnat canadien où je suis arrivée avant-dernière. Julie m’a dit que je devais travailler très, très fort pour performer. Et du haut de mes 11 ans, j’ai décidé que j’allais travailler », rappelle la nageuse Fréchette, qui n’a jamais oublié ce conseil.
À 13 ans, elle s’entraîne donc 35 heures par semaine : du lundi au vendredi, elle entre dans la piscine de son école à 14h50 et en ressort à 20h30, puis le samedi, de 7h à 14h. L’adolescente revient donc à la maison par l’autobus de la ville et se consacre à ses devoirs scolaires durant les 45 minutes de trajet.
« J’aime ça nager. Je me sens vivante dans l’eau. Et quand on fait ce qu’on aime, on ne voit pas la vie de la même façon. Aimer ce qu’on fait nous donne des ailes et nous soulève », souligne Sylvie Fréchette.
L’année des extrêmes
Et c’est en 1992, l’année de ses 17 ans, qu’elle est choisie par Équipe Canada comme l’une des deux athlètes canadiennes qui prendront part aux compétitions de nage synchronisée aux JO de Barcelone.
Une opportunité incroyable et pourtant. « Mon année olympique a été un désastre du début à la fin », affirme-t-elle. D’abord la mort de son grand-père adoré. Puis le 18 juillet, au dernier jour de son entrainement avant le départ pour Barcelone, elle apprend le suicide de son fiancé.
Elle vit alors un véritable choc post traumatique et oubliera tout de son séjour à Barcelone. « Je peux vous dire que jusqu’en décembre (1992) je ne me souviens de rien. Même pas des JO. Je peux vous dire ce qu’ont raconté les journaux, mais c’est un trou noir et j’ai dû faire un travail sur moi », raconte Sylvie Fréchette, qui a malgré tout trouvé l’énergie de se dépasser lors des épreuves olympiques.
« On est tellement plus fort qu’on pense », lance-t-elle.
Et voilà que l’impensable survient : une juge s’emmêle dans son chiffrier, abaissant involontairement la haute performance de l’athlète canadienne d’un point, la faisant passer de la médaille d’or à la médaille d’argent.
Une injustice qui sera néanmoins réparée grâce à l’intervention d’un avocat, scandalisé par l’affaire. « En 1993, on me remettait enfin ma médaille d’or », rappelle l’athlète Fréchette.
Résilience post-choc
La perte de son fiancé laissera aussi une trace indélibile. « Je n’ai jamais réussi à trouver les mots justes pour décrire ce désastre en moi. Le suicide est une solution permanente à une situation qui ne l’est pas », assure-t-elle. « Pourtant, il y a toujours quelqu’un pour vous aider, des gens qui vous tendent la main, des oreilles attentives. Mais il faut se bâtir un coffre à outils quand ça va bien », assure l’athlète Fréchette.
S’ensuivra l’aventure du Cirque du Soleil avec le spectacle O’, mis au point par Franco Dragone. À son contact, elle en a retiré une grande leçon : celui d’avoir le courage de sa vulnérabilité. « Cette vulnérabilité de ce que vous avez de différent, d’unique, de ce que vous pouvez amener au service de l’équipe, de votre communauté. »
Après cette belle aventure circasienne, la naissance de ses deux filles puis la séparation d’avec leur père, la vente de sa maison, elle se retrouve aux commandes de sa petite famille lorsque survient l’épisode qui a surpris la planète au grand complet : la pandémie de 2020.
L’année qui change tout
Voilà donc un nouveau défi pour celle ayant deux bouches à nourrir et que le métier d’entraîneure et de conférencière ne servent plus à rien dans les circonstances. Elle n’hésite pas à demander la PCU et se retrousse les manches pour se réorienter vers une nouvelle carrière. Ce sera les assurances.
En 2024, l’athlète performe à nouveau dans cette nouvelle activité qu’est la vente d’assurances. C’est que la résidente de Prévost sait de quoi elle parle : son père est décédé sans avoir préalablement souscrit à une assurance vie, laissant sa famille dans une situation précaire.
En bonne athlète, Sylvie Fréchette performe dans sa nouvelle carrière.
Son témoignage n’a d’égal que sa fierté d’avoir relevé tous les obstacles sur sa route. Et d’avoir gardé l’espoir malgré tout.
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